Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/375

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de loin les menacent. C’est la même chose qui vous arrive ; engourdis au sein de votre avoir, vous ne songez pas combien de malheurs sont prêts à fondre de tous côtés, et pour emporter de précieuses dépouilles. Quant, au sage, quiconque lui aura ôté les richesses lui laissera tout ce qu’il possède en propre : car il vit satisfait du présent, tranquille sur l’avenir. « Rien, dit Socrate, ou quelqu’autre qui a le même droit contre les choses humaines, et le même pouvoir, rien dont je me sois plus fermement fait un principe, que de ne pas régler sur vos opinions la conduite de ma vie. Rassemblez de toutes parts vos propos accoutumés ; je penserai, non pas que vous invectivez, mais que vous poussez des vagissements, comme les enfants les plus misérables. » Voilà ce que dira l’homme qui a la sagesse en partage, l’homme auquel une âme exempte de vices ordonne de gourmander les autres, non par haine, mais pour apporter remède. Il ajoutera ce que voici : « Votre manière de voir me touche, non pour moi, mais pour vous : haïr et harceler la vertu, c’est abjurer tout espoir de salut. Vous ne me faites aucun tort, pas plus que n’en font aux dieux ces gens qui renversent les autels ; mais la coupable intention est manifeste, et le projet est coupable, alors même qu’il n’a pu nuire. Vos extravagantes fantaisies, je les supporte, comme le grand Jupiter souffre les sottises des poètes : l’un d’eux lui a donné des ailes, et l’autre des cornes ; tel autre, sur la scène, l’a montré adultère, et prolongeant la nuit44. Ils en ont fait, celui-ci, un maître terrible pour les dieux, celui-là, un juge inique pour les hommes ; cet autre, un corrupteur de jeunes gens bien nés qu’il a ravis, et même de ses parens45 ; cet autre encore, un