Page:Sénèque - Œuvres de Sénèque le philosophe, Tome 2, trad Baillard et du Bozoir, 1860.djvu/344

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premier appelé à régner sur la Perse et sur une grande partie de l’Orient. Comme il allait porter la guerre aux Scythes, dont les frontières ceignaient son empire, Ébasus, illustre vieillard, père de trois fils, le supplia de lui laisser l’un d’entre eux pour la consolation de ses derniers jours, en gardant au service les deux autres : « Tu auras plus que tu ne demandes, dit le prince ; tous vont t’être rendus ; » et il les fait égorger sous les yeux du père, auquel il laisse leurs cadavres. C’eût été, en effet, une cruauté de les emmener tous trois.

XVII. Combien Xerxès se montra plus facile ! Pythius lui demandait le congé d’un de ses cinq fils ; il obtint de choisir. Mais Xerxès fit couper en deux celui sur lequel le choix était tombé, et placer une moitié de chaque côté de la route où l’armée devait passer. Ce fut la victime expiatoire de son armée. Aussi son expédition eut-elle le sort qu’elle méritait. Vaincu et mis en fuite, il vit les débris de sa puissance épars au loin sur toute la Grèce, et se sauva presque seul à travers les cadavres des siens.

Telle fut, dans la colère, la férocité des rois barbares, chez qui n’avaient pénétré ni l’instruction ni la culture des lettres. Mais voyez ce roi, sorti du giron d’Aristote, cet Alexandre, qui, dans un banquet, perça de sa main Clitus, son cher Clitus, son compagnon d’enfance, parce que, peu disposé à le flatter, celui-ci ne se prêtait pas volontiers à passer de la liberté macédonienne à la servitude asiatique. Il livra à la rage d’un lion Lysimaque qu’il aimait à l’égal de Clitus. Ce Lysimaque, échappé par un bonheur inouï à la dent de la bête féroce, en devint-il plus doux lui-même, lorsqu’il régna ? Il mutila Télesphore, de Rhodes, son ami, en lui faisant couper le nez et