Page:Sénèque - De la vie heureuse.djvu/42

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luptés ; aussi faut-il avouer que, s’ils sont loin alors de tout malaise, ils ne le sont pas moins de la sagesse ; que, pour la plupart, leur joie est une folie délirante, et leur rire un rire de furieux. Tout au contraire, les plaisirs du sage sont modérés, discrets, presque languissants, tout intérieurs et à peine sensibles au dehors ; car ce n’est point à sa sollicitation qu’ils viennent, et, bien qu’ils se présentent d’eux-mêmes, il ne leur fait point fête, il les accueille et les goûte sans aucun transport. Il les mêle à la vie comme un intermède et un jeu pour égayer le sérieux du drame. Que l’on cesse donc d’allier des choses incompatibles et d’accoler la vertu à la volupté, faux assemblage qui flatte les penchants les plus dissolus. Tel homme livré au plaisir et la bouche toujours pleine des fumées de l’ivresse, sachant qu’il suit la volupté, croit aussi suivre la vertu. Il entend dire en effet qu’elles sont inséparables, puis sur ses vices il écrit sagesse et affiche ce qu’il devrait cacher à tous les yeux. Ainsi ce n’est pas Épicure qui pousse ces hommes à la débauche ; ce sont eux