Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la haute mer, mais que le flux, contrariant l’effort de la rame et du vent, repousse vers le rivage.

PLISTHÈNES.

Surmontez ces vaines terreurs qui troublent votre esprit, et considérez les biens qui vous attendent ici à votre arrivée : ô mon père, vous pouvez être roi.

THYESTE.

Je puis aussi mourir.

PLISTHÈNES.

Mais le pouvoir est une belle chose.

THYESTE.

Ce n’est rien, pour qui ne désire rien.

PLISTHÈNES.

Vous laisserez la couronne à vos enfans.

THYESTE.

Un royaume ne peut contenir deux rois.

PLISTHÈNES.

Ainsi vous voulez rester misérable, quand il ne tient qu’à vous d’être heureux ?

THYESTE.

Crois-moi, mon fils, c’est notre ignorance qui nous fait aimer les grandeurs, et craindre la mauvaise fortune. Au temps de mon élévation, je n’ai jamais cessé d’être dans les alarmes. Je redoutais jusqu’au glaive pendu à ma ceinture. Ô quel bonheur c’est de ne gêner l’ambition de personne, et de prendre un frugal repas modestement assis à terre ! Le crime n’a point d’entrée dans les chaumières, et les mets servis sur une table étroite