Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/243

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au moins l’enfant, ou s’il ajoute un nouveau crime aux deux premiers ?

LE MESSAGER.

Comme un lion d’Arménie, à la crinière flottante, après avoir fait un carnage affreux dans un grand troupeau, conserve encore toute sa rage, quoique sa gueule soit pleine de sang, et sa faim apaisée, et menace encore les jeunes bœufs et les veaux de ses dents fatiguées de meurtres ; ainsi la fureur d’Atrée dure encore et se ranime. Il tient en main son glaive souillé par un double assassinat, et oubliant quelle victime lui reste à frapper, il porte un coup qui la traverse de part en part : l’épée s’enfonçant dans la poitrine de l’enfant sort par son dos ; le malheureux tombe, mourant de sa double blessure, et son sang qui coule éteint la flamme allumée sur l’autel.

LE CHŒUR.

Ô crime affreux !

LE MESSAGER.

Vous frémissez ! mais ce n’est rien ; si Atrée en était resté là, il serait encore vertueux.

LE CHŒUR.

Mais y a-t-il dans la nature un forfait plus grand et plus atroce ?

LE MESSAGER.

Croyez-vous être à la fin de son crime ? vous n’en êtes qu’au premier degré.

LE CHŒUR.

Qu’a-t-il pu faire de plus ? peut-être il a livré les corps à déchirer aux bêtes féroces, et les a privés des honneurs du bûcher ?