Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/32

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décevantes que les commentateurs ont laissées derrière eux, nous fait une loi de nous arrêter à l’entrée :

Omnia te adversumQuia me vestigia terrent,
Omnia te adversum spectantia, nulla retrorsum.

(Horat., Epist. lib. I, ep. 1.)


Il nous suffira de montrer le résultat de leurs efforts, pour en faire sentir l’impuissance et la stérilité. Le plus grand nombre s’accorde à laisser à L. A. Sénèque le Philosophe, quatre de ces dix tragédies connues de tout temps sous son nom, Œdipe, Hipployte, les Troyennes et Médée, comme les meilleures. Nous ne contesterons point cette paternité qu’on lui attribue ; il nous semble même assez juste de lui faire bonne part dans ces dix pièces orphelines que son nom seul peut-être a sauvées du naufrage, et portées à travers les siècles ; mais la raison qui les a fait déclarer siennes existe-t-elle vraiment, et les tragédies dont on lui fait hommage ont-elles sur les autres une supériorité réelle ? Ce serait encore une nouvelle question à décider, et presque aussi difficile que la question principale, à en juger par les contradictions des critiques à cet égard. Juste-Lipse, par exemple, exalte comme une œuvre sublime, incomparable et digne du siècle d’Auguste, les Phéniciennes, que Daniel Heinsius et beaucoup d’autres avec lui, notamment Racine, flétrissent de tout leur mépris. Même contradiction pour les Troyennes, la meilleure des tragédies de Sénèque, suivant Heinsius, la plus mauvaise au jugement de Juste-Lipse. Quand on voit deux critiques d’une autorité si grande