Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/401

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HIPPOLYTE.

Est-ce que vous ne pouvez exprimer ce que vous êtes pressée de me dire ?

PHÈDRE.

Il est facile d’énoncer des sentimens vulgaires, mais les grands sentimens ne trouvent point de paroles.

HIPPOLYTE.

Ne craignez pas, ô ma mère, de me confier vos chagrins.

PHÈDRE.

Ce nom de mère est trop noble et trop imposant ; un nom plus humble convient mieux à mes sentimens pour vous. Appelez-moi votre sœur, cher Hippolyte, ou votre esclave : oui, votre esclave plutôt ; car je suis prête à faire toutes vos volontés. Si vous m’ordonnez de vous suivre à travers les neiges profondes, vous me verrez courir sur les cimes glacées du Pinde. Faut-il marcher au’milieu des feux et des bataillons ennemis, je n’hésiterai pas à exposer mon sein nu à la pointe des épées. Prenez le sceptre que m’a confié votre père, et recevez-moi comme votre esclave. A vous de com- mander, à moi de vous obéir. Ce n’est point affaire de femme de régner sur les villes. Mais vous, qui êtes dans la force et dans la fleur de l’âge, prenez en main le sceptre paternel. Ouvrez-moi votre sein comme à une suppliante, protégez-moi comme votre esclave, ayez pitié d’une veuve.

HIPPOLYTE.

Quele maître des dieux écarte cet riste présage ! mon père vit et nous sera bientôt rendu.