Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/457

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brillans pour les miens ? es-tu bien mort ? Ah‘. viens et prête l’oreille à mes paroles. Je puis le dire sans honte ; cette main vengera ton trépas, j’enfoncerai ce glaive dans mon sein coupable 5 je me délivrerai tout en- semble de la vie et du crime : amante insensée, je veux te suivre sur les bords du Styx, et sur les brûlantes eaux des fleuves de l’enfer. Chère ombre, apaise-toi : reçois ces cheveux dont je dépouille ma tête, et que j’arrache sur mon front. Nos cœurs n’ont pu s’unir, nos destinées du moins s’uniront. Chaste épouse, meurs pour ton époux ; femme infidèle, meurs pour ton amant. Puis-je partager la couche de Thésée, après un si grand crime ? il ne te manquerait plus “que d’aller dans ses bras comme une femme irréprochable dont on a vengé l’honneur. — O mort, seule consolation qui me reste dans la perte de mon honneur, je me jette dans tes bras, ouvre-moi ton sein ! — Athènes, écoute-moi, et toi aussi, père aveugle, et plus cruel que ta perfide épouse. J’ai menti : le crime affreux que j’avais moi- même commis dans mon cœur, je l’ai rejeté faussement sur Hippolyte. Tu as frappé ton. fils innocent, toi, son père, et sa vertu a subi le châtiment d’un inceste dont elle ne s’était point souillée. Homme chaste, homme pur, reprends la gloire qui t’est due. Cette épée fera justice, et, ouvrant mon sein coupable, fera couler mon sang pour apaiser ton âme vertueuse. Ton devoir, après cc coup fatal, la marâtre de ton fils te l’enseigne, ô Thésée ; apprends d’elle à mourir.