Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/486

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présente que du tableau des enfers. L’auteur, en cela, manque tout-à-fait de bon sens et de goût : le drame tragique a besoin de récits ; assurément, mais l’art du poète consiste à les amener ; autrement les personnages ne peuvent plus que tenir hors de propos de fort beaux propos.

Page 67. Dieux suprêmes, et toi, souverain de l’immense empire des morts. Ce récit commence presque dans les mêmes termes que celui de Virgile au sixième livre de l’Énéide. Nous y renvoyons le lecteur, ainsi qu’au Télémaque, liv. xviii.

Page 69. C’est un demi-jour. Notre La Fontaine a parfaitement rendu l’idée de ce double crépuscule :

A l’heure de l’affût, soit lorsque la lumière
Précipite ses traits dans l’humide séjour,
Soit lorsque le soleil rentre dans sa carrière,
Et que, n’étant plus nuit, il n’est pas encor jour, etc.

(La Fontaine, liv. x, fab. 15)

Page 71. La Peur, l’Épouvante, le Deuil. Cette énumération est évidemment imitée de Virgile ; mais Sénèque en a laissé le trait le plus remarquable et le plus profond, mala mentis gaudia, les joies coupables dont le comte de Maistre parle dans ses Soirées de Saint-Pétersbourg.

Non, point de près fleuris. « Tout autour il ne croissait ni herbes ni fleurs ; on n’y sentait jamais les doux zéphyrs, ni les grâces naissantes du printemps, ni les riches dons de l’automne ; la terre y languissait. On y voyait seulement quelques arbustes dépouillés et quelques cyprès funestes. Au loin même, tout à l’entour, Cérès refusait aux laboureurs ses moissons dorées, Bacchus semblait en vain y promettre ses doux fruits etc. » (Fénelon, Télémaque, liv. xviii.)

Page 73. Est-il vrai que la justice tardive saisit les coupables. Quelque déplacé que soit ce morceau, nous ne pouvons nous dispenser d’en faire remarquer, sinon les beautés de style qui sont nombreuses, du moins l’effet moral qui résulte de cette description. Resterait à savoir quelle impression ce récit qui affirme, sous une forme vulgaire, toutes les grandes vérités morales,