Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/7

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mes ont germé sur les débris de l’unité païenne, et que la poussière du grand empire a produit de tous côtés une moisson de peuples nouveaux et vivans de leur vie propre, des centres nombreux se sont formés, les langues sont arrivées à l’âge littéraire, et, par suite, les traductions, les imitations, les reproductions plus ou moins serviles des littératures anciennes se sont multipliées, non plus dans une seule capitale, comme autrefois à Rome, non plus dans une seule langue, mais dans toutes les capitales et dans toutes les langues de l’Europe moderne. Le mal, comme on voit, s’est agrandi dans une effrayante proportion.

Que l’Italie donc ait pris aux Grecs leurs sciences, leurs arts et leur littérature, c’est une vérité certaine ; mais cette vérité ne peut être un reproche adressé par nous aux Latins, puisque nous les avons imités nous-mêmes dans leur imitation ; et ce qu’il y a de plus curieux à observer dans ce rapprochement, c’est que ni de leur part ni de la nôtre ce joug d’une influence étrangère ne fut volontairement accepté. Mêmes efforts à Rome et à Paris pour échapper à cette étreinte fatale, même protestation du génie moderne et du génie romain contre l’envahissement du génie antique et du génie grec, même résistance et même inutilité dans la résistance.

Ce fut vers le temps de la seconde guerre contre Carthage, que Rome sentit les premières atteintes de la Grèce.

« Rome alors, dit M. Michelet[1], recevait docilement

  1. Histoire Romaine, tome II, page 87.