Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/344

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de Jocaste, était fils de Ménécée, et c’est à lui que le trône de Thèbes revenait de droit après la mort de Laïus, sans l’accident du Sphynx qui donna la couronne à Œdipe. Sophocle, et d’après lui Sénèque ont supposé que ce dernier se défiait de son beau-frère, et ont fait servir cette donnée à la péripétie de leur action.

Acte II. Page 25. Ce qui prouverait que Sénèque tenait peu à l’effet dramatique de ses pièces, ou peut-être qu’elles n’étaient pas destinées à la représentation, c’est que, peu retenu de copier Sophocle en beaucoup d’endroits et souvent mot pour mot, il néglige de prendre au poète grec cette ouverture des deux premiers actes si admirable si simple et si grandiose. S’il a cru que le monologue qui ouvre son premier acte, et la conversation qui commence le deuxième étaient d’un meilleur effet, il n’a rien compris à l’ordonnance du drame. Nous pensons qu’il a cédé plutôt à une nécessité purement politique ou à des considérations de mœurs. La royauté n’était pas comprise à Rome ; et le rôle d’Œdipe vis-à-vis de son peuple n’eût point paru à la hauteur des idées romaines sur l’autorité.

La réponse de l’oracle est obscure. Cet endroit est pris dans Sophocle, acte i, sc. 2 :

ŒDIPE.

Ah ! cher Créon quelle est la réponse de l’oracle ?

CRÉON.

Rassurez-vous, seigneur, la voici « Si nous écartons la cause de nos malheurs, nous cesserons d’être malheureux. »

Une telle réponse doit paraitre peu rassurante : elle exprime sans doute un sens fort clair, mais elle n’apprend rien de nouveau ; car, apparemment Œdipe connaissait le principe : Sublata causa tellitur effectus. L’oracle de Delphes parle ici comme Hamlet dans le drame de Shakespear : « Soyez persuadés, dit-il à ses amis, qu’il n’y a pas dans tout le Danemarck : un brigand qui ne soit en même temps un malhonnête homme. » Hamlet a ses raisons pour ne pas s’exprimer plus clairement, l’oracle aussi ; Sophocle ajoute qu’on ne peut pas forcer le dieu à parler un langage plus intelligible.