Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 3.pdf/311

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femme à qui tous les crimes ont servi de degrés pour monter jusqu’au trône ?

La sainte Piété s’exila en tremblant du palais des Césars, et la cruelle Érinnys vint prendre sa place dans cette cour funeste ; elle souilla de sa torche cette demeure sacrée, et brisa tous les liens de la nature : l’épouse de Claude fait périr son mari par un poison cruel, et meurt elle-même bientôt après par le crime de son fils : toi aussi, tu meurs de sa main, jeune Britannicus, malheureux enfant qui seras désormais l’éternel sujet de nos larmes, et qui devais être l’appui de la maison d’Auguste : de cet astre naguère si brillant, rien ne reste plus qu’un peu de cendre, et une ombre plaintive : sa marâtre elle-même n’a pu retenir ses pleurs quand elle vit son corps mis sur le bûcher, et ces membres et ce visage aussi beaux que ceux de l’amour, disparaître au milieu de flammes dévorantes.

OCTAVIE.

Que mon tyran me tue moi-même, s’il ne veut périr de ma main.

LA NOURRICE.

La nature ne vous a pas donné assez de force pour cela.

OCTAVIE.

J’en trouverai dans ma haine, dans ma douleur, dans mes chagrins, dans mes malheurs, dans l’excès de ma misère.

LA NOURRICE.

Tâchez plutôt d’adoucir par vos tendres soins ce cruel époux.