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NOTES D’UNE FRONDEUSE

14 juillet 1886, celui qui figura au Salon des Champs-Elysées.

Campé sur Tunis, le cheval noir de légende, le jeune ministre de la guerre salue la foule. Ses spahis l’escortent, et, dans l’éloignement, à l’horizon, s’esquisse le moulin de Longchamps — le moulin joli par-dessus lequel la France jeta, ce jour-là, son bonnet phrygien, pour le béguin nouveau dont elle était coiffée !

Mais celui dont elle arbora la cocarde était un sentimental, un respectueux, en dépit de ses allures à la houzarde ; effeuillant la pâquerette, plutôt que la fleur d’oranger ; violant les convenances, pas les Constitutions — et la belle fille ne lui pardonna point d’avoir été godiche, de ne l’avoir pas quelque peu forcée…

À droite du portrait, en le regardant, est une Nature morte de P. Gallibert : un poulet sur une table de cuisine. En pendant, de l’autre côté, une bergerade de l’École française, genre fin dix-huitième siècle. Au-dessus de la porte de l’écurie, un lambrequin de verdure au petit point.

Sur la paroi de gauche, derrière l’estrade du commissaire-priseur, des panneaux de tapisserie sont tendus, et quatre panoplies sont accrochées. La première est moderne : casque et cuirasse de cuirassier, sabres et pistolets de cavalerie. La seconde, la troisième sont d’armes moyen-âge, mais d’un « moyen-âge » excessivement contemporain. La dernière — près du perron réservé qui change en porte la fenêtre du secrétariat — est autrement intéressante. Elle est composée exclusivement d’objets d’origine allemande : casques à pointe, courts pistolets ornés de cuivre, baïonnettes, etc.

Le long du mur, parallèlement au comptoir (qui sert, aujourd’hui seulement, de barrière entre le public et