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398 CIL DE SE VIGNE ET D ACIER

jugera sans avoir égard aux personnes. On le prie de considérer

qu’il arrive quelquefois que les plus grands hommes sont éblouis par

trop de lumières et de connoissances ce malheur ne regarde point

la partie adverse de M. D*

Horace donne des règles pour faire de bonnes pièces de théâtre.

Les tragédies doivent non-seulement instruire, elles doivent plaire

aussi; je conclus de là qu’Horace a voulu apprendre ce qui pouvoit

le plus toucher et intéresser les spectateurs, et donner aux poëtes le

moyen de parvenir au point de la perfection.

Dans cette pensée, il leur ordonne d’observer exactement ce qui

convient aux mœurs, aux coutumes, aux climats des personnages

qu’ils introduisent sur la scène. Il veut que l’on conserve à chacun

son propre caractère, et que l’on ne change point les idées que les

anciens ont données des héros. Il faut qu’Achille soit violent, Médée

cruelle, etc.

Il continue ce même précepte dans les vers qui suivent immédia-

tement après, et il ajoute que si un auteur entreprend de faire une

tragédie dont le sujet et les acteurs soient entièrement inconnus, il

doit avoir une attention particulière au caractère qu’il aura donne

à chacun d’eux. Il faut qu’il le soutienne depuis le commencement

jusqu’à la fin, sans se démentir en la moindre chose* Voilà ce qui

est nécessaire pour faire de bonnes pièces de théâtre. Mais Horace

n’en demeure pas là il veut apprendre comment on peut atteindre

a la perfection il exhorte à surmonter les difficultés qu’on y peut

rencontrer, en montrant aux poëtes ce qui est excellent, après leur

avoir enseigné ce qui étoit bon on ne peut douter que ce ne soit là

son intention.

Peut-il la mieux marquer, qu’en déclarant qu’à la vérité il est

difficile de dire d’une manière nouvelle et particulière des choses con-

nues de tout le monde, et si communes que presque personne ne

les ignore; mais que cependant on fera bien mieux de mettre sur lu

scène quelque action de la guerre de Troie, que d’aller chercher des

noms inconnus, peut-être inventés, et des événements purement ima-

ginaires?

Quelle contradiction et quelle absurdité peut-on trouver dans cette

interprétation? Dès qu’Horace a montré comment il faut éviter les

défauts qui rendent une tragédie insupportable et ridicule, il en-

est assez éclaircie, il n’est pas nécessaire de réfuter plus au long ce sentiment

qui n’a riea que d’absurde*. »

Dans l’édition de Hambourg {i?33) de VEorace de Dacier, nous lisons ici

de plus comme je l’ai montré ailleurs. » C’est, sans doute, une allusion

aux réponses faites à Sévigné.