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1675de Vitré, et les adresses qu’elle a pour satisfaire sa sotte gloire (car elle[1] est de tout pays), et la crainte qu’elle a que je ne sois jalouse d’une religieuse de Vitré : cela feroit une assez méchante farce de campagne.

Je vous dois dire des nouvelles de cette province. M. de Chaulnes est à Rennes avec beaucoup de troupes. Il a mandé que si on en sortoit, ou qu’on fît le moindre bruit, il ôteroit[2] pour dix ans le parlement de cette ville[3] : cette crainte fait tout souffrir. Je ne sais point encore comme ces gens de guerre en usent à l’égard des pauvres bourgeois. Nous attendons à Vitré Mme de Chaulnes, qui vient voir la princesse[4] ; nous sommes en sûreté sous ses auspices ; mais je vous assure que quand il n’y auroit que moi, M. de Chaulnes prendroit plaisir à me considérer[5] : c’est la seule occasion où je pourrois répondre de lui. N’ayez donc aucune inquiétude ; je suis en sûreté comme dans cette Provence que vous dites qui est à moi.

Je ne remercierai point d’Hacqueville de vous écrire trois fois la semaine : c’est se moquer de lui ; les louanges qu’il mérite là-dessus sont trop loin de ma pensée. Il m’écrit deux fois ; j’en veux retrancher une par mon exemple, et c’est par pure amitié pour lui, ne voulant avoir qu’une médiocre part à l’assassinat que nous lui faisons tous : il succombera, et puis nous serons au désespoir ; c’est une perte irréparable, et tous les autres d’Hacquevilles ne nous consoleront point de celui-là. Il m’a

  1. Au lieu du pronom elle Perrin a répété : « la sotte gloire. »
  2. Dans l’édition de la Haye : « on ôteroit. » Les mots « pour dix ans » ne sont donnés que par les éditions de Perrin.
  3. Le parlement, comme nous l’avons dit, fut en effet transféré à Vannes. Voyez les lettres des 20 octobre et 13 novembre suivants.
  4. La princesse de Tarente.
  5. Dans Perrin : « à me marquer des égards. »