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1676que M. de Grignan approuvera toutes nos résolutions, et me saura bon gré même de me priver du plaisir de vous voir tout à l’heure, dans la pensée de ne lui pas ôter le plaisir de vous avoir cet été à Grignan ; et après, ce sera à lui à courre, et il courra, et nous le verrons avec plaisir. Je vous demande seulement, et à lui aussi, de vous laisser jouir d’une santé qui sera le fondement de la véritable joie de votre voyage ; car je compte que sans elle on ne peut avoir aucun plaisir.

Je crains que votre lettre du 20e juin ne soit égarée ou perdue : vous savez, ma très-chère, que tout ce qui vient de vous ne sauroit m’être indifférent, et que ne vous ayant point, il me faut du moins la consolation de vos lettres[1].

Je reçois votre lettre du premier juillet. Vous me paroissez toujours en peine de ma santé : votre amitié vous donne des inquiétudes que je ne mérite plus. Il est vrai que je ne puis fermer les mains mais je les remue, et m’en sers à toutes choses. Je ne saurois couper ni peler des fruits, ni ouvrir des œufs ; mais je mange, j’écris, je me coiffe, je m’habille ; on ne s’aperçoit de rien, et je ne mérite aucune louange de souffrir patiemment cette légère incommodité. Si l’été ne me guérit pas, on me fera mettre les mains dans une gorge de bœuf ; mais comme ce ne sera que cet automne, je vous assure que je vous attendrai pour ce vilain remède : peut-être n’en sera-t-il pas besoin. Je marche fort bien, et mieux que jamais, car je ne suis plus une grosse crevée : j’ai le dos d’une plateur

  1. Cette phrase n’est que dans la seconde édition de Perrin (1754). Il serait bien possible qu’elle eût été faite par lui pour tenir la place de la dernière phrase du premier paragraphe : « Nous vous l’avons mandé, etc., » phrase qu’il a supprimée plus haut dans cette seconde édition.