Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/301

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1677 véritable. Je sens que je ne l’incommode point : la liberté qui se trouve ici répond de tout ce que je dis. Nous dévidons beaucoup de chapitres, et de tous pays nous revenons à vous :

C’est un penchant si doux qu’on y tombe sans peine.

Je suis en parfaite santé : ne me dites point que vous n’avez pas sur moi un pouvoir despotique, et que le serein vous résiste ; il est vrai que c’est mon ancien ami, et que j’ai peine à rompre tout à fait avec lui. Mais pour le voyage de Vichy, par exemple, il est entièrement despotique, et si ce n’étoit que vous croyez que ces eaux me sont salutaires, et que votre amitié vous fait voir[1] dans l’avenir ce que ma santé présente m’empêche d’y voir, je vous assure, ma très-chère, que je n’irois point du tout ; mais je fais ce voyage agréablement, dans la pensée de rassurer votre imagination pour jamais[2] et cette seule raison est meilleure que nulle autre que l’on y puisse mêler.

Vous me représentez fort bien votre coup de tonnerre j’avois quelquefois entendu parler des effets surprenants du tonnerre ; mais je n’y crois pas tant qu’à ce que vous m’en dites. Cette petite fille toute morte, sans qu’il y paroisse, comme si c’étoit avec de la poudre de sympathie,[3], me paroît une chose bien étonnante. Je comprends bien que vous ayez eu la curiosité de la voir ; j’aurois bien été de cette partie : j’aime toutes les choses extraordinaires ; celle-là l’est fort ; ce n’est point comme on a accoutumé

  1. 2. « Il est entièrement pour vous, et sans que votre amitié vous fait voir, etc. » (Édition de 1754)
  2. 3. « Ce n’est donc qu’afin de rassurer votre imagination pour jamais que je fais ce voyage agréablement. » (Ibidem.) — La fin de l’alinéa : « et cette seule raison, etc., » manque dans cette édition.
  3. 4. Voyez la lettre du 28 janvier 1685.