Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/450

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rossignols, qui m’appellent et qui vous charmeroient. Eh mon Dieu ! ne viendra-t-il pas une année où je puisse voir mon mari sans quitter ma mère ? En vérité, je le souhaiterais fort ; mais quand il faut choisir, je ne balance pas à suivre mon très-cher Comte, que j’aime et que j’embrasse de tout mon cœur.


1678

690. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE DE GRIGNAN[1].

Vendredi 27e mai.

Je veux vous rendre compte d’une conférence de deux heures que nous avons eue avec M. Fagon[2], très-célèbre

  1. Lettre 690. — 1. Les détails que Mme de Sévigné donne sur l’état de santé de sa fille montrent que cette lettre ne peut être que de 1678 ou 1679, et le 27 mai n’était un vendredi que dans la première de ces deux années.
  2. 2. Gui-Crescent Fagon, né à Paris le 11 mai 1638. Il était fils de Henri Fagon, commissaire ordinaire des guerres, et de Louise de la Brosse, nièce de Gui de la Brosse, médecin ordinaire de Louis XIII, et petit-fils d’un médecin ordinaire de Henri IV. Il eut le bonnet en 1664, et fut nommé successivement, en 1680, premier médecin de la Dauphine, puis de la Reine et des enfants de France. En 1693, il devint premier médecin du Roi. Il mourut le 11 mars 1718, au Jardin des plantes, dont il était surintendant. Il avait épousé Marie Nozereau, dont il eut deux fils. « Fagon, dit Saint-Simon (tome I, p. 110 et 111), étoit un des beaux et bons esprits de l’Europe, curieux de tout ce qui avoit trait à son métier, grand botaniste, bon chimiste, habile connoisseur en chirurgie, excellent médecin et bon praticien. Il savoit d’ailleurs beaucoup ; point de meilleur physicien que lui ; il entendoit même bien les différentes parties des mathématiques. Très-désintéressé, ami ardent, mais ennemi qui ne pardonnoit point, il aimoit la vertu, l’honneur, la valeur, la science, l’application, le mérite, et chercha toujours à l’appuyer sans autre cause ni liaison, et à tomber aussi rudement sur tout ce qui s’y op-