Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/78

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Vous devriez m’envoyer quelques morceaux de vos mémoires[1]. Je sais des gens qui en ont vu quelque chose, qui ne vous aiment pas tant que je fais, quoiqu’ils aient plus de mérite.


580. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ.

Le même jour que je reçus cette lettre, j’y fis cette réponse.
À Paris, ce 18e septembre 1676.

J’ai ouï dire[2]que le petit Rabutin vouloit prendre le prince d’Orange à la barbe, mais qu’il fut si étonné quand il vit qu’il n’en avoit point, qu’il se laissa tomber dans un fossé où il fut pris. Je vous envoie sa lettre, qui vous apprendra mieux comment la chose se passa. Il m’en coûtera cent pistoles pour son cheval, ou pour sa rançon. Mais cela lui a fait bien plus d’honneur que l’argent ne vaut. Il est bien heureux d’avoir été fait seul prisonnier, au moins de gens qui aient un nom.

Il y a quinze jours que je me suis mis dans les remèdes,

  1. 5. Les Mémoires de Bussy parurent pour la première fois en 1696, c’est-à-dire trois ans après la mort de l’auteur, arrivée le 9 avril 1693.
  2. Lettre 580. — 1. Dans le manuscrit de l’Institut, cette lettre commence ainsi : « Vous avez raison, Madame, de croire que le petit Rabutin vouloit prendre le prince d’Orange, mais il le vouloit prendre à la barbe, et l’on dit qu’il fut si étonné, etc. » Trois lignes plus loin, on lit : au vrai, au lieu de : mieux. La phrase : « Il m’en coûtera cent pistoles, etc., » est remplacée par : « Vous y verrez ce que me coûtera cette affaire. » Le second alinéa est supprimé tout entier. À la place du cinquième, on lit ce qui suit : « Le mariage de la chanoinesse est rompu, dans le temps que nous prétendions faire la noce. Je vous en dirai le détail quand j’aurai l’honneur de vous voir. Mme de Bussy se porte toujours fort bien, et si ce temps dure, elle ne mourra pas étique. » Le dernier alinéa manque.