1681 elle est soumise à l’ordre de la Providence, et qu’il n’y a que celle du salut, que Dieu nous donne lui-même, qui soit estimable. Cela console et fait qu’on se soumet plus doucement à sa mauvaise fortune. La vie est courte, c’est bientôt fait ; le fleuve qui nous entraîne est si rapide, qu’à peine pouvons-nous y paroître. Voilà des moralités de la semaine sainte[1], et toutes conformes au chagrin que j’ai toujours quand je vois que tout le monde s’élève ; car au travers de toutes mes maximes, je conserve toujours beaucoup de foiblesse humaine.
Adieu, mon cher cousin ; adieu, mon aimable nièce : aimez-moi toujours, et me mandez de vos nouvelles. Je laisse la plume à Corbinelli.
J’avois l’imagination pleine de l’affaire que vous savez ; si vous l’aviez oubliée, c’est celle de ma nièce. Un rayon d’espérance de l’accommoder vient d’éclaircir cette imagination dans ce moment ; sans cela je ne vous aurois point écrit aujourd’hui[2].
Viendrez-vous ici ce mois d’avril[3] ? Ah ! que j’en serois aise ! j’ai cent réflexions à faire sortir de ma tête, qui n’en sortiront jamais qu’en votre présence. Amenez la divine marquise, c’est-à-dire par divine, Madame votre fille, et par marquise, Mme de Coligny. Si elle vient plaider, je lui apprendrai le droit ; car je suis résolu de lui apprendre quelque chose, et il n’y a rien que cela[4] que je sache mieux qu’elle.