Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 7.djvu/26

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Grignan. Je ne vous fais point de compliment sur la prison de Monsieur votre fils[1] ; cela est si général que ce n’est pas une peine. Le marquis de Bussy[2] est à la cour. Pour moi[3], je ne sens plus mes maux : la longueur de ma disgrâce m’a rendu indifférent sur tout ce qui regarde ma fortune, et je ne songe plus qu’à bien vivre et me réjouir. Je fais travailler ici : c’est à des commodités qui manquent à ma maison, qui est d’ailleurs assez belle. Puisque Dieu l’a voulu, j’aime autant la vie douce et tranquille que je mène depuis quelques années, qu’une plus agitée : j’ai assez fait de bruit autrefois ; les uns en font au commencement, les autres à la fin de leur vie ; les uns n’en font jamais, les autres en font toujours. Tout cela est égal à la mort. Mais je m’aperçois que voici bien des moralités : qu’importe, pourvu qu’il y ait du bon sens ?

1680

842. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, ce mercredi 14e août.

C’est à cette heure, ma fille, que je suis dans le repos de mes bois[4], et dans cette abstinence et ce silence que j’ai tant souhaité. Je quittai lundi ce tourbillon passant tous ceux que j’ai jamais vus : comme il étoit plus resserré, il en étoit plus violent. Je trouvai ici votre lettre,

  1. 5. Voyez la fin de la lettre du 28 août suivant, p. 46.
  2. 6. Le fils aîné de Bussy.
  3. 7. La fin de la lettre, à partir d’ici, manque dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : la feuille où elle était écrite a été coupée.
  4. Lettre 842. — 1. Dans l’édition de 1754, la lettre commence ainsi : « Je suis enfin dans le repos de mes bois. »