Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/181

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de vous apprendre la victoire tout entière que ma fille a remportée sur ses parties, tout d’une voix, et avec dépens. Si je ne vous l’ai pas mandé aussitôt qu’à Monsieur d’Autun, c’est, que ne vous ayant écrit qu’un jour après lui, on nous fit une vilaine chicane qui troubla un peu notre joie, par la crainte de n’avoir pas notre arrêt signé avant la levée du parlement; mais ayant donné remède à ce mal, je vous écrivis une grande lettre, que vous avez dû recevoir présentement. Ainsi vous ne serez point jaloux du prélat, et vous croirez qu’il n’est point arrivé de changement dans mon cœur qui puisse m’obliger de le préférer à vous. ̃ C’est avoir envie de vivre chrétiennement avec la fortune, que de lui pardonner la conduite qu’elle a eue avec vous, en faveur des bontés qu’elle a pour vos amis. Il y a toujours lieu de se consoler, quand on observe tout ce qu’elle fait ; car fort souvent aussi elle rend tant de gens malheureux, qu’on peut dire comme à l’opéra : Goûtons l’unique bien des coeurs infortunés

Ne soyons pas seuls misérables[1].

Les personnes bien disposées à prendre patience et à se consoler, en trouvent partout des raisons, et c’est en vérité une grande sagesse ; le contraire me paroit d’une folie et d’une inutilité pitoyable.

Je suis toujours charmée que vous aimiez Abbadie. Notre ami a été le premier à lui rendre un témoignage d’estime, et à se rendre à la force de ses raisonnements [2] Après lui, je vous souhaitois rendu, et voilà qui est fait. Ce goût a été assez universel; mais je m’en tiens à vous

  1. LETTRE 1061. i. Vers du Thésée de Quinault. Voyez tome IV, p. 204, et la note 13.
  2. 2. Voyez pus haut p. 33 l'apostille de Corbinelle à la lettre du 10 Mars 1687.