Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/101

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Mais ne pourriez-vous jamais faire quelque autre voyage où vous ne fussiez point dans cet horrible tourbillon, où vous puissiez jouir du repos qu’on trouve dans un si beau pays, et de la société des personnes raisonnables que vous y avez [1]? N’y pourriez-vous point un peu mieux dormir, c’est-à-dire simplement dormir ? car vous n’en avez pas le temps[2]. Faut-il avoir toujours occupation, et ruineuse et continuelle bassette ? Si tout cela se pouvoit changer, et la grandeur de votre table, ce seroit une chose charmante et même Monsieur le chevalier s’en trouveroit tout à fait bien ; car l’air de Grignan est bien différent de celui-là[3] : vous en avez emporté tous les cœurs ; je n’ai point de peine à le croire. Je[4] me suis souvenue de ce que me disoit à Paris M. de Grignan en confidence : « Madame, elle ne daignera pas regarder toutes ces pauvres femmes de Provence. Monsieur, laissez-la faire, je vous réponds qu’elle fera des merveilles. » Vous dégagez ma parole et vous lui donnez sans doute un sensible plaisir. Pour moi, ma belle, je ne songe point encore au voyage de Nantes ; j’y fais exécuter des gens qui me doivent je serois peu propre à ces sortes de choses. J’ai un grand compte à faire avec le nouveau fermier, et c’est à quoi l’abbé Charrier me sera


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  1. 18. « Mais ne pourriez-vous jamais faire quelque autre voyage à Avignon, sans que vous y fussiez dans cette horrible agitation ? Ne pourriez-vous point jouir du repos qu’on trouve dans ce beau pays, et de la société des personnes raisonnables qui l’habitent? » (Édition de I754.)
  2. 19. « C’est-à-dire dormir, car vous n’en aviez pas le temps. » (Ibidem.)
  3. 20. « Faudroit-il toujours s’occuper de cette ruineuse bassette? a Si tout cela se pouvoit changer, ce seroit une chose charmante, et Monsieur le chevalier même s’en trouveroit tout à fait bien, car l’air de Grignan est bien différent de celui-là. » (Ibidem.)
  4. 21. Cette phrase et la suivante, qui finit à un sensible plaisir, ne se trouvent que dans notre manuscrit, ou elles terminent la lettre.