qui viennent de si loin. Ce que vous me mandiez l’autre jour sur Livry que nous prêtons à M. Sanguin, lui permettant même d’y faire une fontaine, tout cet endroit, celui de Mme de Coulanges, et dans vos amitiés même, tout est si plein de sel, que nous croyons que vous n’avez point d’autre poudre pour vos lettres. J’admire même la gaieté[1] de votre style au milieu de tant d’affaires épineuses, accablantes, étranglantes. Vraiment, c’est bien vous, ma chère fille, qu’il faut admirer, et non pas moi ; je suis seule comme une violette, aisée à cacher, je ne tiens aucune place ni aucun rang sur terre, que dans votre cœur, que j’estime plus que tout le reste, et dans celui de mes amis. Ce que je fais est la chose du monde la plus aisée. Mais vous, dans le rang que vous tenez, dans la plus brillante et la plus passante province de France, joindre l’économie à la magnificence d’un gouverneur, c’est ce qui n’est pas imaginable, et ce que je ne comprends pas aussi qui puisse durer longtemps, surtout la dépense de votre fils augmentant tous les jours[2]. Comme ces pensées troublent souvent mon repos, je crains bien qu’étant plus près de cet abîme, vous ne soyez aussi plus livrée à ces tristes réflexions : voilà, ma chère Comtesse, ma véritable peine car pour la solitude, elle ne m’en fait point du tout[3]3. Nôtre bonne et commode compagnie s’en est allée ; j’ai chassé en même temps mon fils et sa femme : l’un devoit aller chez sa tante, l’autre a une autre visite pressée ; je les ai envoyés tous deux chacun de leur côté ; j’en suis ravie; nous nous retrouverons dans deux jours, nous en serons plus aises ; et même je ne suis point
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