Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/442

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éiat, j’en sens toutes les conséquences; je cause avec ce Comte, que j’aime plus qu’il ne s’aime lui-même .je m'amuse avec Pauline ; je réfléchis avec M. de la Garde. je donne quelques coups de patte aux prélats ; je soupire encore avec Monsieur le doyen9; j’attends mon marquis ; et sur le tout j’aime passionnément ma chère fille ; je loue sa bonne tète, sa bonne conduite, et je lui souhaite la continuation de son courage.

1260. DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, mercredi 1er février.

Nous voici dans un vilain train de neiges, de pluies et de vents terribles ; mais au sortir de ces tempêtes, nous trouverons de grands jours et de beaux jours. Ce qui tue, c’est que le temps a beau courir bien vite, et trop vite, vous ne sauriez attraper vos revenus ; bon Dieu ! quel horrible mécompte 90 et 91, et tant que les yeux peuvent aller [1]! Jamais il ne fut une telle dissipation : on est quelquefois dérangé ; mais de s’abîmer et de s’enfoncer à perte de vue, c’est ce qui ne devroit point arriver. On ne sauroit parler de loin sur un tel sujet, car il faudroit des réponses, mais on peut bien en soupirer, et quelque douleur qu’on en ressente, on ne voudroit pas vivre dans l’ignorance : il me faut, comme vous dites, la carte et la clef de vos sentiments ; il faut,que j’entre dans

9. Voyez la lettre du 4 janvier précédent, p. 387.

  1. LETTRE 1260. -- 1. M. de Griguan s’étant cru obligé, pour l’arrangement de ses affaires, de céder les années 90 et 91 du revenu de sa charge, il s’étoit retiré à Grignan pour y passer l’hiver, au lieu de le passer à Aix et à Marseille, ou de faire un voyage à la cour. Voyez la lettre du 22 janvier précédent, p. 428. (Note de Perrin.)