Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/587

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vous l’avoir mandé. Après y avoir été seize mois chez mon fils, j’ai trouvé qu’il seroit fort joli de venir passer l’hiver ici avec ma fille. Ce projet d’un voyage de cent cinquante lieues parut d’abord un château en Espagne ; mais l’amitié l’a rendu si facile, qu’enfin je l’ai exécuté depuis le 3- d’octobre jusqu’au 24è, que j’arrive au port de Robinet1, où je suis reçue à bras ouverts de Mme de Grignan, avec tant de joie, d’amitié et de reconnoissance, que je trouvai que je n’étois pas venue encore assez tôt, ni d’assez loin. Après cela, Monsieur, dites que l’amitié n’est pas une belle chose ! c’est elle qui me fait très-souvent penser à vous, et souhaiter de vous revoir encore une fois ici en ma vie. Nous y serons tout l’hiver et tout l’été : si vous ne trouvez un moment pour nous venir voir, je croirai que vous m’avez oubliée. Vous ne reconnottrez pas cette maison, tant elle est embellie ; mais vous y retrouverez les maîtres toujours tout pleins d’estime pour vous, et moi, Monsieur, avec une amitié capable de faire enrager notre ami2, et très-digne que vous fassiez cette visite.

l305. DE MADAME DE SÉVIGNÉ

AU COMTE DE BUSSY RABUTIN.

Deux mois après que j’eus écrit cette lettre (n° 1301, p. 576), je reçus la réponse de Mme de Sévigné.

A Grignan, ce 13è novembre 1690.

Quand vous verrez la date de cette lettre, mon cousin, vous me prendrez pour un oiseau. Je suis passée

LETTRE 1304. 1. Voyez tome III, p. 155, note 7,