Page:Sévigné - Lettres choisies, Didot, 1846.djvu/651

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aussi un billet pour Galois, que je priais M. Branjon de payer. Répondez-moi sur cet article. Il est marié, le bon Branjon ; il m’écrit, sur ce sujet, une fort jolie lettre. Mandez-moi si ce mariage est aussi bon qu’il me le dit. C’est une parente de tout le parlement et de M. d’Harouïs. Expliquez-moi cela, mon enfant. Je vous adressais aussi une lettre pour notre abbé Charrier. Il sera bien fâché de ne plus vous trouver : et M. de Toulon ! vous dites fort bien sur ce bœuf, c’est à lui à le dompter, et à vous à demeurer ferme comme vous êtes. Renvoyez la lettre de l’abbé à Quimperlé.

Pour la santé de votre pauvre sœur, elle n’est point du tout bonne. Ce n’est plus de sa perte de sang, elle est passée ; mais elle ne se remet point, elle est toujours changée à n’être pas reconnaissable, parce que son estomac ne se rétablit point, et qu’elle ne profite d’aucune nourriture ; et cela vient du mauvais état de son foie, dont vous savez qu’il y a longtemps qu’elle se plaint. Ce mal est si capital, que, pour moi, j’en suis dans une véritable peine. On pourrait faire quelques remèdes à ce foie ; mais ils sont contraires à la perte de sang, qu’on craint toujours qui ne revienne, et qui a causé le mauvais effet de cette partie affligée. Ainsi ces deux maux, dont les remèdes sont contraires, font un état qui fait beaucoup de pitié. On espère que le temps rétablira ce désordre : je le souhaite ; et si ce bonheur arrive, nous irons promptement à Paris. Voilà le point où nous en sommes, et qu’il faut démêler, et dont je vous instruirai très-fidèlement.

Cette langueur fait aussi qu’on ne parle point encore du retour des guerriers. Cependant je ne doute pas que l’affaire[1] ne se fasse ; elle est trop engagée : mais ce sera sans joie, et même si nous allions à Paris, on partirait deux jours après, pour éviter l’air d’une noce et les visites, dont on ne veut recevoir aucune : chat échaudé, etc.

Pour les chagrins de M. de Saint-Amand, dont il a fait grand bruit à Paris, ils étaient fondés sur ce que ma fille ayant véritablement prouvé, par des mémoires qu’elle nous a fait voir à tous, qu’elle avait payé à son fils neuf mille francs sur dix qu’elle lui a promis, et ne lui en ayant par conséquent envoyé que mille, M. de

  1. Le mariage de Pauline de Grignan avec le marquis de Simiane était convenu : on n’attendait pour le célébrer que le retour du marquis, qui était à l’armée.