Page:Sacher-Masoch - La Czarine noire et autres contes sur la flagellation, 1907.djvu/370

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
354
L’AMOUR CRUEL.

Après avoir quitté le collège, il s’absorba dans l’étude de la cabbale, doctrine occulte des Hébreux, et semblait réfractaire à toutes les joies du monde, transportant d’admiration tous les rabbins de la ville, qui lui donnèrent le titre de Lacham, ce qui, au Levant, signifie maître. Les plus grands savants de Smyrne allaient le voir dans la maison de son père et se laissaient instruire par lui.

Sabbathai, cependant, n’était ni un simple cabaliste ni, dans le vrai sens du mot, un savant. C’était un fanatique. Le zèle religieux ordinaire et la curiosité scientifique de ses auditeurs ne lui suffisaient pas. Il exigeait d’eux une stricte application de la doctrine et des exercices rigoureux. À son exemple, ils devaient jeûner plusieurs jours par semaine et se baigner la nuit en haute mer.

Bientôt, ces mortifications et d’autres semblables ne le contentèrent plus. Pour s’imposer de plus héroïques souffrances, il rechercha en mariage, Sarah, la fille du riche et considéré Jacob Eldavid, la plus belle personne de Smyrne. Étant donnée la réputation dont jouissait le jeune saint de vingt ans, Eldavid s’estima heureux de lui confier son unique enfant. Le mariage fut célébré avec un