Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/100

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se passe sur cette terre, on en a assez, et l’on ne désire plus qu’une chose, c’est de pouvoir s’endormir d’un long sommeil ! — Il s’absorba dans ses rêveries. — La vie céleste, monsieur, je pense que c’est une plaisanterie. Ici-bas tout ce qui respire doit faire les cent coups pour sustenter sa pauvre existence, et on me fera croire que là-haut seront nourris tant de fainéants ! S’il y a une vie au-delà du tombeau, c’est que nous recommencerons de peiner et de souffrir.

— Est-ce que vous ne croyez pas à une autre vie ? demanda doucement le capitulant, et sa voix tremblait.

— Moi, je n’affirme rien, répliqua Kolanko en se grattant le nez. Le diak[1] doit savoir ce qui en est, il a étudié les saintes Écritures. Et il est écrit : « C’est pourquoi les hommes meurent comme les bêtes, et leur sort est égal. Et tout tend en un même lieu. Ils ont tous été tirés de la terre, et ils retournent tous dans la terre. Qui connaît si l’âme des enfants des hommes monte en haut, et si l’âme des bêtes descend en bas ? Et j’ai reconnu qu’il n’y a rien de meilleur à l’homme que de se réjouir dans ses œuvres, et que c’est là son partage. Car, qui le pourra mettre en état de connaître ce qui doit arriver après lui ? » C’est mot pour mot dans la Bible.

— Le meilleur pour l’homme, c’est de se réjouir

  1. Chantre d’église, sacristain et maître d’école à la fois, le diak joue un rôle important dans la paroisse.