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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX


fort aise d’en être quitte pour cette plaisanterie, le président qui s’imaginait qu’elle jetterait un voile sur le reste, et que Lucile s’en étant aperçue la première aurait eu la prudence de ne faire en rien soupçonner leur intrigue, le président, dis-je, se mit à rire avec les autres, on dégagea comme on put le baudet fort affligé d’être interrompu dans son sommeil, on mit des draps blancs, et Fontanis remplaça dignement le plus superbe des ânes qui se fût trouvé dans le pays. En vérité c’est la même chose, dit la marquise quand elle l’eut vu couché, je n’aurais jamais cru qu’il y eût une ressemblance si entière entre un âne et un président au parlement d’Aix. — Quelle était donc votre erreur, madame, reprit le marquis, ne savez-vous donc pas que c’est parmi ces docteurs que cette cour a toujours élu ses membres, je gagerais que celui que vous voyiez sortir là en a été premier président.

Le premier soin de Fontanis dès le lendemain fut de demander à Lucile comment elle s’était tirée d’affaire : celle-ci bien instruite dit que s’étant aperçue de la plaisanterie, elle s’était retirée fort promptement, mais avec l’inquiétude pourtant d’avoir été trahie, ce qui lui avait fait passer une nuit affreuse et désirer avec bien de