être qui n’agit sur aucun de nos sens ; toutes nos
idées sont des représentations des objets qui nous
frappent ; qu’est-ce qui peut nous représenter l’idée
de dieu qui est évidemment une idée sans
objet, une telle idée, leur ajouterez-vous, n’est-elle
pas aussi impossible que des effets sans cause ?
Une idée sans prototipe, est-elle autre chose qu’une
chimère ? Quelques docteurs, poursuivrez vous, assurent
que l’idée de dieu est innée, et que les hommes [ont]
cette idée dès le ventre de leur mère ; mais cela
est faux, leur ajouterez-vous, tout principe est
un jugement ; tout jugement est l’effet de l’expérience,
l’expérience ne s’acquiert que par l’exercice
des sens, d’où suit que les principes religieux
ne portent évidemment sur rien et ne sont
point innés ; comment poursuivrez-vous ; a-t-on
pu persuader à des êtres raisonnables que la chose
la plus difficile à comprendre étoit la plus essentielle
pour eux, c’est qu’on les a grandement effrayés,
c’est que quand on a peur, en cesse de
raisonner, c’est qu’on leur a sur-tout recommandé
de se défier de leur raison et que quand
la cervelle est troublée, on croit tout et n’examine
rien, l’ignorance et la peur ; leur direz-vous
encore, voilà les deux bases de toutes les
religions, l’incertitude où l’homme se trouve par
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