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LA PHYSIQUE DE VOLTAIRE.

Akakia, où il tournait en ridicule les idées et les ouvrages de Maupertuis.

Frédéric lui-même descendit alors dans la lice : il prit ouvertement parti pour le président de son Académie ; il rédigea d’abord des brochures pour le défendre, puis, recourant à des moyens plus despotiques, il fit brûler la Diatribe du docteur Akakia par la main du bourreau (24 décembre 1752). Voltaire put assister à cette exécution, de la fenêtre d’une maison de Berlin, où il était venu s’établir pour fuir le séjour de Potsdam.

Cette diatribe, qui causa tant d’émoi à Berlin, et qui eut un si grand succès dans toute l’Europe (le premier jour où elle fut mise en vente à Paris, on en débita six mille exemplaires), nous paraît un pamphlet des plus médiocres, maintenant que nous la lisons en dehors des passions du moment. La forme en est froidement plaisante, et le fond ne rachète pas ce défaut. Le docteur fait une course vagabonde à travers les œuvres et les opinions scientifiques de Maupertuis sans montrer un jugement bien sûr ; préoccupé de tourner tout en ridicule, il ne sait pas réserver son ironie pour ce qui la mérite réellement.

Tant qu’il attaque directement le caractère de son ennemi, les traits portent juste et ferme. Il flétrit la conduite de Maupertuis dans l’affaire Kœnig, dévoile les procédés d’intimidation dont il a usé pour arracher à l’Académie de Berlin un jugement aussi injuste que bizarre, et dénonce les lettres qu’il écrivait à la princesse d’Orange pour obtenir qu’elle imposât silence à son bibliothécaire. Il signale l’humeur insociable de Maupertuis, sa jalousie toujours éveillée à l’égard de tout ce qui brille dans les sciences ou dans les lettres ; il rappelle l’indélicatesse de ses procédés dans l’expédition de Laponie, comment Mau-