Page:Saint-Amant - Œuvres complètes, Livet, 1855, volume 1.djvu/480

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Doit faire au vice avecque fermeté
Sous l’estendard de la severité,
Mais pour drapper desormais les coustumes,
Pour en grossir desormais des volumes,
Belles ou non, je m’en garderay bien,
Et fay serment de n’y censurer rien.
Tout au contraire, il m’entre en la pensée,
Si vers le Nort ma fortune est poussée,
Si la Vistule à mes yeux se fait voir,
Comme le ciel m’en a donné l’espoir,
De me vestir, en noble et fier Sarmate,
D’un beau velours dont la couleur esclate,
Qui grave et long, sur un poil precieux,
Rende mon port superbe et gracieux ;
D’armer mon flanc d’un courbe et riche sabre,
De m’agrandir sur un turc qui se cabre,
De transformer mon feutre en un bonnet
Qui tienne chaud mon crane razé net,
De suivre en tout la polonoise mode,
Jusqu’à la botte au marcher incommode,
Jusqu’aux festins où tu dis qu’on boit tant,
Et dont l’excès m’estonne en me flatant ;
Bref, jusqu’aux mœurs, et mesme je m’engage
Jusqu’à ce point d’apprendre le langage,
De le polir, de m’y traduire en vers
D’un stile haut, magnifique et divers ;
Si que de tous, en la cour florissante
De nostre reine adorable et puissante,
Et pour qui seule au monde je nasquy,
Je sois nommé le gros Saint-Amantsky.
Quand tu m’auras, par quelque heureuse voye,
Fait accorder ce grand sujet de joye,
Et que sa bouche, où luisent tant d’atraits,
Où les rubis vivent en leurs portraits,
Aura formé le cher mot où j’aspire,