Page:Saint-Amant - 1907.djvu/27

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Saint-Amant ne peut donc plus, je pense, après ce que l’on vient de lire, nous apparaître comme « tout à fait caduc », selon l’expression malheureuse de Sainte-Beuve.

Il me semble, au contraire, singulièrement remuant et très propre encore à donner à ceux qui écrivent en vers des leçons de netteté, de pittoresque et de force. La force est ce qui domine en lui. Son vers est robuste. On ne trouvera de mièvrerie dans tsaint-Amant qu’au poème de Lydian et Sylvie que nous avons inséré comme exemple d’une des phases de son talent. Partout ailleurs, il est l’homme qui affirme. Son poing, plus d’une fois, dut faire tressauter les bouteilles sur la table du Cormier, et il étonna bien ses compagnons un jour que, pour justifier je ne sais quel caprice, il s’écria : « Messieurs, j’ai cinquante ans de liberté sur la tête. » C’était un représentant de la race individualiste qui, en même temps, nous donnait Corneille. Avec Saint-Amant, le seizième siècle achève de mourir et meurent avec lui, pour bien des années, les influences de Ronsard, de Rabelais, de Mathurin Régnier, de Du Bartas. Le règne va commencer de ceux qui furent des