J’aime une brune dont les yeux
Font dire à tout le monde
Que, quand Phébus quitte les cieux
Pour se cacher sous l’onde,
C’est de regret de se voir surmonté
Du vif éclat de leur beauté.
Mon luth, mon humeur et mes vers
Ont enchanté son âme ;
Tous ses sentiments sont ouverts
À l’amoureuse flamme ;
Elle m’adore, et dit que ses désirs
Ne vivent que pour mes plaisirs.
Quel jugement y dois-je asseoir ?
Veut-elle me complaire ?
Mon cœur s’en promet à ce soir
Une preuve plus claire.
Viens donc, ô nuit ! que ton obscurité
M’en découvre la vérité.
Sommeil, répands à pleines mains
Tes pavots sur la terre ;
Assoupis les yeux des humains
D’un gracieux caterre*,
Laissant veiller en tout cet élément
Ma maîtresse et moi seulement.
Ainsi, jamais de ta grandeur
Rien n’abaisse la gloire ;
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