Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pagne.) Je sçavois qu’elle étoit mal bâtie & mal meublée, & que je ne pouvois y trouver qu’un mauvais souper & un méchant lit ; j’étois fatigué & j’avois faim ; je me déterminai à passer la nuit dans une métairie qui par sa situation, & par un certain air de commodité, de propreté & d’abondance champêtre avoir fixé mon attention.

Cette ferme étoit placée sur le penchant d’un côteau qui la garantissoit du vent d’ouest si violent dans ces contrées ; elle étoit à cent toises d’une petite riviere qui coule dans un joli vallon : des prairies artificielles, des vergers remplis de pommiers à cidre, des champs couverts de légumes l’environnoient ; il y avoit à quelque distance de la maison un petit bois de hêtre ; des chevaux, des bœufs, des brebis paissoient dans le vallon & sur les côteaux ; quatre enfants de la plus agréable figure jouoient dans une cour peuplée de volaille de toute espèce : à la porte de la cour je vis une femme de l’âge de vingt-cinq à trente ans ; elle étoit blonde & fraîche, quoiqu’un peu hâlée ; elle avoit de grands yeux noirs & une gorge très-blanche qu’elle laissoit voir toute entiere en donnant à tetter à un enfant de cinq