Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/282

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où il avoit été vendre du seigle, & où ses affaires l’avoient retenu quelques jours. Je connus aisément le maître du logis à la maniere dont il fut reçu ; sa femme l’embrassa tendrement ; elle prit deux de ses enfants sur ses bras ; elle les éleva jusqu’aux joues de leur pere qui se laissa baiser : il tenoit en même tems par les mains deux autres de ses enfants qui attendoient leur tour de le baiser aussi. Après ces douces caresses, ils vinrent tous vers le jardin, & j’allai au-devant d’eux. Le fermier étoit un homme de trente ans, fort bien fait ; son visage étoit assez beau, & sa physionomie étoit noble & agréable : il me remercia de la préférence que j’avois donnée à sa maison pour y passer la nuit. Ils me quitterent ensuite, & je les vis entrer dans une chambre qui donnoit sur le jardin & dont la fenêtre étoit ouverte : ils allerent ensemble vers un berceau où reposoit leur cinquieme enfant : ils se courboient tous deux sur le berceau, & tour-à-tour regardoient l’enfant & se regardoient en se tenant par la main, & en souriant. J’étois enchanté du spectacle touchant de cet amour conjugal & de cette tendresse paternelle.

Le souper étant prêt, nous allâmes nous mettre