Page:Saint-Simon - Œuvres, vol. 4-5.djvu/127

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En dernière analyse, le principal désir de presque tous les individus n’est point d’agir sur l’homme, mais sur la nature. Il n’est personne, pour ainsi dire, qui ne renonce avec empressements une autorité très-absolue, quand l’exercice de cette autorité exclut la jouissance des avantages de la civilisation, qui sont le résultat de l’action exercée sur les choses. Le nabab Anglais, qui a fait fortune au Bengale, et qui exerce le pouvoir le plus illimité sur des milliers d’Indiens, soupire après le moment où il pourra retourner en Europe, afin d’y jouir des agréments de la vie, et quoiqu’il sache bien qu’en Angleterre il ne pourra commettre le moindre acte arbi-

    inconvénients ont à peu près disparu dans le nouveau système. En effet, le développement de l’action sur la nature a changé la direction de ce sentiment en le transportant sur les choses. Le désir de commander aux hommes s’est transformé peu a peu dans le désir de faire et de défaire la nature à notre gré.

    De ce moment, le désir de dominer, inné dans tous les hommes, a cesse d’être nuisible, ou au moins, on peut apercevoir l’époque où il cessera d’être nuisible, et où il deviendra utile. C’est ainsi que la civilisation a perfectionné le moral de l’homme, non-seulement sous le rapport de la vie animale ou de l’intelligence, mais aussi quant à la vie organique ou aux passions.

    Quoique, d’après les lois de l’organisation humaine, ce second ordre de fonctions vitales ne soit point perfectible par lui-même, il l’est par l’influence que le premier exerce sur lui.