Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/151

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utilement et si constamment la France. La considération d’une belle-fille si distinguée lui fit accorder le tabouret, et encore à Mlle de La Trémoille, qui épousa depuis un duc de Saxe-Weimar. On donna aussi le pour[1] à M. de La Trémoille. J’ai expliqué ailleurs ce que c’est. De cette manière on contenta Mme de La Trémoille et ses frères, qui ne vouloient point multiplier la princerie qu’ils avoient obtenue, et on accorda à M. de La Trémoille une distinction fort grande, qui donne le tabouret à la femme de son fils aîné, et à sa fille aînée, sans aller au delà à aucun des cadets. On verra dans la suite la subtile escroquerie du prince de Talmont, et où elle en est demeurée.

Parlant des Bouillon, il faut dire ici qu’en ce même temps, le duc d’Albret, voyant la cour et la ville contre lui, et le roi contre sa coutume ayant pris parti, envoya son blanc signé à M. de Bouillon pour terminer leur procès tout comme il lui plairoit. M. de Bouillon avoit pris congé du roi pour aller à Dijon, où ce procès avoit été renvoyé et alloit commencer ; cela remit la paix dans la famille, et raccommoda parfaitement le père avec le fils, mais non avec le roi, auprès duquel le père fit inutilement tout ce qu’il put pour raccommoder ce qu’il avoit gâté dans sa colère. Le roi, qui savoit gré au comte d’Évreux de s’être attaché au comte de Toulouse, lui donna vingt mille livres de pension pour tant que la guerre dureroit. Ce sont de ces grâces qu’un terme facilite, mais qui n’y demeurent guère bornées.

Rinschild, à la tête de douze mille Suédois, sans aucune artillerie, défit entièrement, le 12 février, Schulembourg, qui avoit vingt mille Saxons ou Moscovites et beaucoup de canon. La cavalerie de ce dernier lâcha pied d’abord, et abandonna vingt-deux pièces de canon, dont les Suédois se servirent. Schulembourg se mit à la tète des quinze mille hommes d’infanterie, qui fut enfoncée de façon qu’il n’en

  1. Voy., t. II, p. 186.