Page:Sainte-Beuve - Lettres à la princesse.djvu/155

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
LETTRES

crée, je le crains, un fait irréparable. L’empereur n’aurait pas fait cela à Paris[1] : il a obéi à un premier mouvement que personne n’a combattu. Chateaubriand, qui avait vu l’étranger, a dit : « On n’écrit avec mesure que dans la patrie. » Deux seuls journaux se sont réjouis de la lettre et du coup qu’elle frappe, ce sont deux journaux royalistes, la Gazette et l’Union. Il y a un proverbe oriental : « Veux-tu savoir si tu as commis une faute ? regarde dans les yeux de ton ennemi. »

Votre jugement sur le discours, l’autre soir, m’a paru approcher du vrai : — il est bon qu’il y ait plus d’un côté dans l’interprétation napoléonienne. Le prince représente l’interprétation démocratique, patriotique, de 1815 — bleue. Il peut y avoir des nuances au bleu. Mais le blanc ne sera jamais une de ces nuances.

Le vieux Laurent (de l’Ardèche), qui a assisté à 1815, disait hier : « Il a été frappé pour avoir parlé de Bonaparte en Bonaparte et sous un Bonaparte. » C’est s’affaiblir pour le chef de l’État

  1. Il voyageait en Algérie.