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DE JOSEPH DELORME

Le soleil disparu comme en des tabernacles ;
À travers des lambeaux de nuages en sang,
La lune blanche et pure aiguisant son croissant…
Surtout dis-moi qu’il est là-haut un meilleur monde,
Où pour les cœurs choisis un saint bonheur abonde.


À M…[1]


Ô vous qui, lorsque seul et la tête baissée
Je suivais mon chemin,
Tout d’abord sur mon front avez lu ma pensée,
Et m’avez pris la main ;

Dont l’amitié voudrait à mon âme souffrante
Sauver le poids des maux,
Et rattacher mes jours, comme une vigne errante,
À de meilleurs rameaux ;

Soit que je lève enfin, soit que je courbe encore
Ce triste front jauni,
Que ma nuit continue ou que vienne l’aurore,
Ami, soyez béni !

Déjà s’enfuit de vous l’âge ardent, où les rêves
Sont des éclairs de feu ;

  1. On a supposé, dans une édition belge, que cette pièce était adressée à un philosophe célèbre auquel, ne serait-ce que par le ton calme et la couleur bleue, le portrait ne saurait se rapporter. Nous croirions bien plutôt que dans la pensée de Joseph Delorme il s’agissait de M. Jouffroy. — On trouvera, à la fin de ce volume, une lettre de M. Jouffroy lui-même sur Joseph Delorme.