Sa perte à tous les cœurs épris de sa morsure,
Sans plus de miel, va laisser la blessure ;
Pleurez !
Et vous, Chanson, qu’elle appelait près d’elle,
Et qui n’osiez qu’effleurer de votre aile
Ses fils dorés,
Sous le lilas désert, où sa place est laissée,
Soir et matin, fidèle à sa pensée,
Pleurez !
EN REVENANT DU CONVOI DE GABRIELLE[1]
Quand, de la jeune amante, en son linceul couchée,
Accompagnant le corps, deux Amis d’autrefois,
Qui ne nous voyons plus qu’à de mornes convois,
À cet âge où déjà toute larme est séchée ;
Quand, l’office entendu, tous deux silencieux,
Suivant du corbillard la lenteur qui nous traîne,
Nous pûmes, dans le fiacre où six tenaient à peine,
L’un devant l’autre assis, ne pas mêler nos yeux,
Et ne pas nous sourire, ou ne pas sentir même
Une prompte rougeur colorer notre front,
- ↑ Gabrielle Dorval, fille de la célèbre actrice de ce nom et l’amie du poète Fontaney. Celui-ci l’enleva de sa famille, l’emmena en Angleterre ; ils y vécurent quelques mois ensemble, de travail, de misère et d’amour ; ils en revinrent tous deux mortellement atteints. Ils moururent à six semaines l’un de l’autre, Gabrielle la première. À son convoi je me trouvai avec V. H. dans la même voiture.