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GABRIEL.



Elle jette la bourse au mendiant… (Page 39.)

ASTOLPHE.

Vous oubliez que j’en ai tous les moyens. Son secret est en ma puissance.

LE PRÉCEPTEUR.

Vous n’en abuserez jamais, vous me l’avez dit.

ASTOLPHE.

Je la menacerai.

LE PRÉCEPTEUR.

Vous ne l’effraierez pas. Il sait bien que vous ne voudrez pas déshonorer le nom que vous portez tous les deux.

ASTOLPHE.

C’est un préjugé de croire que la faute des pères rejaillisse sur les enfants.

LE PRÉCEPTEUR.

Mais ce préjugé règne sur le monde.

ASTOLPHE.

Nous sommes au-dessus de ce préjugé, Gabrielle et moi.

LE PRÉCEPTEUR.

Votre intention serait donc de dévoiler le mystère de son sexe ?

ASTOLPHE.

À moins que Gabrielle ne s’unisse à moi par des liens éternels.

LE PRÉCEPTEUR.

En ce cas il cédera : car ce qu’il redoute le plus au monde, j’en suis certain, c’est d’être relégué par la force des lois dans le rang des esclaves.

ASTOLPHE.

C’est vous, monsieur Chiavari, qui lui avez mis en tête toutes ces folies, et je ne conçois pas que vous ayez dirigé son éducation dans ce sens. Vous lui avez forgé là un éternel chagrin. Un homme d’esprit et un honnête homme comme vous eût dû la détromper de bonne heure, et contrarier les intentions du vieux prince.

LE PRÉCEPTEUR.

C’est un crime dont je me repens, et dont rien n’effacera pour moi le remords ; mais les mesures étaient si bien prises, et l’élève mordait si bien à l’appât, que j’étais arrivé à me faire illusion à moi-même, et à croire que cette destinée impossible se réaliserait dans les conditions prévues par son aïeul.