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LÉLIA.

Christ et à son règne ? Tout homme qui croit et qui prie, tout homme que la foi met en communion avec Dieu, n’offre-t-il pas en lui un reflet de cette trinité mystérieuse, plus ou moins affaibli, selon la puissance des révélations de l’esprit céleste à l’esprit humain ? L’âme, l’élan de l’âme vers un but incréé, et le but mystérieux de cet élan sublime, tout cela n’est-il pas Dieu révélé en trois enseignements distincts : la force, la lutte et la conquête ?



J’écrivis sur la muraille… (Page 59.)

« Ce triple symbole de la Divinité, ébauché dans l’humanité entière, a pu se produire une fois, splendide et complet, entre Jésus, le Père du monde et l’Esprit-Saint figuré par la foi catholique sous la forme d’une colombe, pour signifier que l’amour est l’âme de l’univers.

— Ces mystiques allégories me font sourire, répondit Pulchérie. Voilà comme vous êtes, âmes d’élite, pures essences ! Il vous faut voir et commenter le grand livre de la révélation ; il faut que vous soumettiez la parole sacrée aux interprétations de votre orgueilleuse philosophie. Et quand, à force de subtilités, vous êtes parvenues à donner un sens de votre choix aux mystères divins, vous consentez alors à vous incliner devant la foi nouvelle expliquée par vous et refaite à votre usage. C’est devant votre propre ouvrage que vous daignez vous prosterner : convenez-en, Lélia.

— Je n’essaierai pas de le nier, ma sœur. Mais qu’importe, si c’est pour nous la seule manière de croire et d’espérer ? Heureux ceux qui peuvent se soumettre à la lettre sans le secours de l’esprit ! Heureuses les rêveries sensibles et folles qui ramènent l’esprit rebelle à la soumission devant la lettre ! Quant à moi, je trouvais dans les rites et dans les emblèmes de ce culte une sublime poésie et une source éternelle d’attendrissement. La forme et la disposition des temples catholiques, la décoration un peu théâtrale des autels, la magnificence des prêtres, les chants, les parfums, les intervalles de recueillement et de silence, ces antiques splendeurs qui sont un reflet des mœurs païennes au milieu desquelles l’Église prit naissance, m’ont frappée de respect toutes les fois qu’elles m’ont surprise dans une disposition impartiale.

« L’abbaye était nue et dévastée. Mais, en errant un jour parmi les décombres, j’avais découvert l’entrée d’un caveau qui, grâce aux éboulements dont elle était