Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 4.djvu/318

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

de vue, il devait le craindre ; mais, en le frappant trop fort et trop vite, il a élevé, sur les ruines de ce parti, un parti bien autrement habile et bien autrement redoutable, un parti uni par l’esprit de caste et l’esprit de corps, les nobles et les prêtres ; et malheureusement je ne vois plus de contrepoids dans la bourgeoisie.

Avec tous ses travers, la bourgeoisie avait son côté utile comme prépondérance.

Sceptique ou voltairienne, elle avait aussi son esprit de corps, sa vanité de parvenu. Elle résistait au prêtre, elle narguait le noble, dont elle était jalouse. Aujourd’hui, elle le flatte ; on a relevé les titres et montré des égards aux légitimistes dont on s’est entouré ; vous voyez si on les a conquis ! Les bourgeois ont voulu alors être bien avec les nobles, dont on avait relevé l’influence ; les prêtres ont fait l’office de conciliateurs. On s’est fait dévot pour avoir entrée dans les salons légitimistes. Les fonctionnaires ont donné l’exemple ; on s’est salué et souri à la messe, et les femmes du tiers se sont précipitées avec ardeur dans la légitimité ; car les femmes ne font rien à demi.

Depuis un an, tout cela a fait un progrès énorme, effrayant, dans les provinces. Les prêtres font des mariages, ils font avoir des dots en échange de la confession. On a poursuivi des sociétés secrètes qui ne pouvaient rien, parce qu’on ne s’y entendait pas. La Société de Saint-Vincent-de-Paul est très unie, elle marche comme un seul homme, elle est la reine des