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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Et puis, dans les épreuves véritables, je pense aussi aux devoirs de cette vie où nous sommes, et votre patience, votre vertu (pardonnez-moi un mot vieilli, mais toujours bon), se présentent devant moi pour me donner de la volonté. Vous avez été bien malheureux, mon ami, et, pourtant, il me semble qu’au fond du cœur vous êtes le plus heureux des hommes, parce que vous avez la conscience la plus pure et l’équilibre le plus divin. Vous avez la certitude d’une récompense là-haut, tandis que, nous autres, nous n’avons que l’espoir d’un dédommagement.

Je vous demande pardon pour la lettre prolixe d’Émile. Il est prolixe, c’est sa nature, en écrivant. Il ne vous entretient que de nos malades, comme si c’était bien intéressant. Il ne se dit pas assez que vous recevez trop de lettres et que vous y répondez trop fidèlement. — La seule chose bonne de sa lettre, c’est la conversion qu’il vous doit, et dont il n’est pas encore bien rempli ; car il ne me l’a fait savoir qu’en me permettant de lire l’aveu qu’il en fait. Nous avions des querelles sur ce sujet, et il en avait surtout avec Maurice, qui brûlait d’aller là-bas, et qui y aurait été, sans la crainte de mon désespoir en dedans. Je ne l’aurais pourtant pas empêché de suivre son idée, qui était à la fois artistique et patriotique. Mais j’aurais bien souffert ! — Voilà que je fais comme Émile, et que je vous entretiens de nous. Rien de tout cela ne vaut la peine d’être dit.

Quand c’est à vous que je parle, je voudrais n’avoir