Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/39

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que je n’écris pas pour le genre humain. Le genre humain a bien d’autres affaires en tête que de se mettre au courant d’une collection de romans et de lire l’histoire d’un individu étranger au monde officiel.

Les gens de mon métier n’écrivent jamais que pour un certain nombre de personnes placées dans des situations ou perdues dans des rêveries analogues à celles qui les occupent. Je ne craindrai donc pas d’être outrecuidante en priant ceux qui n’ont rien de mieux à faire que de relire certaines pages de moi pour compléter celles qu’ils ont sous les yeux.

Ainsi, dans Teverino, j’ai inventé une jeune fille ayant pouvoir, comme la première Eve, sur les oiseaux de la création, et je veux dire ici que ce n’est point là une pure fantaisie ; pas plus que les merveilles qu’on raconte en ce genre du poétique et admirable imposteur Apollonius de Tyane ne sont des fables contraires à l’esprit du christianisme. Nous vivons dans un temps où l’on n’explique pas bien encore les causes naturelles qui ont passé jusqu’ici pour des miracles, mais où l’on peut déjà constater que rien n’est miracle ici-bas, et que les lois de l’univers, pour n’être pas toutes sondées et définies, n’en sont pas moins conformes à l’ordre éternel.

Mais il est temps de clore ce chapitre des oiseaux et d’en revenir à celui de ma naissance.