Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/422

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maternel, il paraît que je me mis, non à crier, mais à pleurer de vraies larmes qui firent beaucoup d’effet. Viens, mon pauvre cher amour, dit la portière en me reprenant ; on ne veut pas de toi, allons-nous-en.

Ma pauvre bonne maman fut vaincue. Rendez-la-moi, dit-elle : pauvre enfant ! tout cela n’est pas sa faute. Et qui a apporté cette petite ? — Monsieur votre fils lui-même, madame : il attend en bas : je vais lui reporter sa fille. Pardonnez-moi si je vous ai offensée, je ne savais rien, je ne sais rien, moi ! J’ai cru vous faire plaisir, vous faire une belle surprise… — Allez, allez, ma chère, je ne vous en veux pas, dit ma grand’mère : allez cherchez mon fils, et laissez moi l’enfant.

Mon père monta les escaliers quatre à quatre. Il me trouva sur les genoux, contre le sein de ma bonne maman, qui pleurait en s’efforçant de me faire rire. On ne m’a pas raconté ce qui se passa entre eux, et comme je n’avais que 8 ou 9 mois, il est probable que je n’en tins pas note. Il est probable aussi qu’ils pleurèrent ensemble et s’aimèrent d’autant plus. Ma mère, qui m’a raconté cette première aventure de ma vie, m’a dit que, lorsque mon père me ramena auprès d’elle, j’avais dans les mains une belle bague avec un gros rubis, que ma bonne maman avait détachée de son doigt, en me chargeant de la mettre à celui de ma mère, ce que mon père me fit observer religieusement.