Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/474

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d’or ? — Laisse-la tranquille, disait ma mère : je ne peux travailler en repos que quand elle commence ses romans entre quatre chaises.

Je me rappelle d’une manière plus nette, l’ardeur que je prenais aux jeux qui simulaient une action véritable. J’étais maussade pour commencer. Quand ma sœur ou la fille aînée du vitrier venaient me provoquer aux jeux classiques de pied de bœuf ou de main-chaude, je n’en trouvais aucun à mon gré ou je m’en lassais tout de suite. Mais, avec ma cousine Clotilde ou les autres enfans de mon âge, j’arrivais d’emblée aux jeux qui flattaient ma fantaisie. Nous simulions des batailles, des fuites à travers ces bois qui jouaient un si grand rôle dans mon imagination. Et puis, l’une de nous était perdue, les autres la cherchaient et l’appelaient. Elle était endormie sous un arbre, c’est-à-dire sous le canapé. On venait à son aide : l’une de nous était la mère des autres ou leur général, car l’impression militaire du dehors pénétrait forcément jusque dans notre nid, et, plus d’une fois, j’ai fait l’empereur et j’ai commandé sur le champ de bataille. On mettait en lambeaux les poupées, les bons-hommes et les ménages, et il paraît que mon père avait l’imagination aussi jeune que nous, car il ne pouvait souffrir cette représentation microscopique des scènes d’horreur qu’il voyait à la guerre. Il disait à ma mère : — Je t’en prie, donne un coup de balai au champ de bataille