Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/499

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et bien faite, si elle résistait aux premières épreuves, si elle ne se cassait pas le nez à la première chute, si ses yeux d’émail avaient une espèce de regard dans mon imagination, elle devenait ma fille, je lui rendais des soins infinis, et je la faisais respecter des autres enfans avec une jalousie incroyable.

J’avais aussi des jouets de prédilection, un entre autres que je n’ai jamais oublié et qui s’est perdu à mon grand regret, car je ne l’ai point brisé, et il se peut qu’il fût effectivement aussi joli qu’il me le paraît dans mes souvenirs.

C’était une pièce de surtout de table assez ancienne, car elle avait servi de jouet à mon père dans son enfance, le surtout entier n’existant plus apparemment à cette époque. Il l’avait retrouvée chez ma grand’mère en fouillant dans une armoire, et, se rappelant combien ce jouet lui avait plu, il me l’avait apporté. C’était une petite Vénus en biscuit de Sèvres, portant deux colombes dans ses mains. Elle était montée sur un piédestal, lequel tenait à un petit plateau ovale doublé d’une glace et entouré de découpures de cuivre doré. Dans cette garniture se trouvaient des tulipes qui servaient de chandeliers, et quand on y allumait de petites bougies, la glace, qui figurait un bassin d’eau vive, reflétait les lumières et la statue, et les jolis ornemens dorés de la garniture.

C’était pour moi tout un monde enchanté que